Savez-vous d’ailleurs ce qu’est un cairn dans le langage montagnard?
Dressé élégamment avec des pierres pas trop pointues, bien équilibré, joliment élaboré, le cairn est un amas artificiel de pierres dont le but est bien souvent de marquer le sentier mais il peut également baliser des limites de pâturages entre éleveurs en montagne. Du coup, suivre des cairns n’est pas forcément recommandé. C’est exactement comme à la lecture d’une carte IGN top 25, vous avez les sentiers marqués en rouge et le néophyte notera des traits verts et même, pourra, sur le terrain, se mettre en tête ou plutôt en jambe de vouloir les suivre. Hélas pour ces mêmes gambettes, ce sont des limites administratives soit du parc national du Mercantour, soit des forêts domaniales mais de cheminement, que nenni. Il en est de même des cairns. Les suivre peut vous sauver lors d’une randonnée se terminant par un épais brouillard mais peut aussi vous amener à suivre une ligne de crêtes limitant les alpages des brebis de tel éleveur . Quand vous partez en randonnée sur un de nos itinéraires, nous vous proposons avant de partir, d’étudier une carte et de faire l’inventaire des possibilités qu’offre notre région du Mercantour.
Les fonctions du cairn sont multiples.
Lors de vos vacances écoresponsables, vous serez amenés à parcourir nos belles montagnes du Mercantour . Un cairn n’est pas un tas de pierres fait par l’homme inutilement. Les bergers aiment, en surveillant le troupeau, marquer leur territoire pour ne pas aller sur les terres du voisin ou que le voisin ne vienne sur ses propres limites. Rien ne vaut une matérialisation sur le terrain pour éviter tout conflit car chaque brin d’herbe a sa valeur. On ne plaisante pas avec l’herbage.
- Le cairn sert aussi à visualiser le chemin pour se repérer quand le cheminement n’est pas évident. Mais tout adepte de la randonnée doit avoir conscience que suivre un cairn ne mène pas forcément là où il veut se rendre. Mais une fois ceci dit, le cairn est une valeur sûre quand on est sur un sentier de randonnée et après avoir vérifié sur votre carte que vous êtes bien dans la bonne direction. Combien de fois, dans les brumes d’un orage ou d’un brouillard dense, on a eu le soulagement d’entrevoir un cairn qui vous signale que vous n’êtes pas perdu…en tout cas que dans cette nature soudain rendue si sauvage et tellement inhumaine, le tonnerre grondant, les éclairs jaillissant des sommets, les cimes des arbres se balançant violemment agitées par le vent de la tempête, il existe le signe d’une présence humaine. Des hommes sont passés par ici et ont fait ce petit monticule, tout n’est pas perdu! La soirée va être sauvée et même, on va avoir droit à une petite bière à l’hébergement. Les secours ne seront pas déclenchés. Alors, le cairn devient le symbole de la solidarité entre hommes et vous avez une pensée pour ceux qui avant vous, ont mis une petite pierre à l’édifice. Pensez à apporter votre contribution en choisissant un caillou qui va savoir se loger dans la construction du cairn.
- – les cairns balisent les sentiers au cheminement aventureux et incertain comme des amas rocheux, des terrains sablonneux et arides.
- Les cairns servent à signaler un point géographique comme un col ou un point particulier
- ils peuvent aussi marquer des pratiques religieuses comme au Népal ou au Tibet et partout en Himalaya où ils sont enroulés souvent de drapeaux à prière flottant au vent. D’ailleurs on les appelle chevaux du vent. Il convient de respecter une circumvolution en passant à gauche du cairn en pays bouddhiste et à droite en pays Bön. On les appelle chevaux du vent ou chevaux du souffle et ce sont de petits bouts de tissus bleu, blanc, rouge, vert et jaune imprimés de différents mantras ou de prières qui s’effilochent dans le temps et partent conduire les prières et les souhaits à qui veut bien les entendre.
- Les cairns sont aussi utilisés pour commémorer des évènements historiques ou des accidents etc.
Les formes des cairns:
Ce sont parfois des formes colossales attestant des nombreux passages et des rituels. C’est comme une superstition, on choisit une pierre, on ne sait pas pourquoi mais on le fait universellement dans le monde entier.Ce peut être aussi des pyramides branlantes ou aussi des monticules discrets ou encore des formes anthropomorphiques selon la qualité de la pierre
Les cairns sont vivants et l’expression « apporter la pierre à l’édifice » devient ici une image concrète! Une semaine dans le Mercantour vous donnera l’occasion de voir quelques cairns inoubliables.
Le cairn: un ami qui vous veut du bien
Découvrir le Mercantour et ses cairns se fait avec un sac à dos et c’est au sac à dos qu’on reconnait le montagnard. C’est l’élément fondamental et incontournable du randonneur : il existe depuis les temps modernes un nombre incalculable de modèles mais pour vous aider à choisir voici quelques conseils pour se baser sur les qualités suivantes : arriver à caser l’indispensable casse-croûte, celui que vous attendez toute la matinée avec délice en comptant le faire après le col ou le sommet. Le top c’est bien sûr, de défaire son sac, ouvrir la surprise du chef sur un sommet panoramique, sans trop de vent, point trop n’en faut, mais juste une petite brise rafraîchissante, le dos appuyé sur un cairn cet ami qui vous veut du bien sur un sommet car il saura vous protéger par son ombre soit du soleil qui tape fort à cette altitude soit de la bise qui elle aussi s’infiltre insidieusement à travers les microfibres de votre polaire pourtant réputée perspirante sans coutures. Ah, le vocabulaire développé par les grandes marques de vêtements de sport laisse sur le carreau les bacs moins 2 et permet d’enrichir son vocabulaire :
La vue à 360° est bien sûr en prime avec une météo favorable, en espérant faire une lecture de paysage, une nappe de charriage qui s’avance, l’ombre de la Corse qui se laisse deviner, le Mont Viso, dans les brumes de l’été, le Gélas aussi. Enfin voici ce qu’on appelle les conditions idéales.
Après, il y a la version hard qui existe aussi. Ne promettons pas de miracles. La Montagne est versatile. Il est des sommets qu’on atteint en vitesse, on reste sur le col histoire de dire qu’on y est mais on n’a qu’un souhait , le passer et fuir les conditions hivernales.
Vacanciers, arrêtez d’empiler des cairns en montagne sans but précis.
Cette mode, amplifiée par les réseaux sociaux « à chacun son cairn » est révélatrice de notre période nombrilisme. Chacun veut être photographié devant son cairn et sculpter le paysage de son passage. Nouvelle star d’Instagram, construire un cairn devient une pratique populaire qui à première vue est bon enfant mais peut provoquer des dégâts sur la nature. Il convient de ne pas prendre de pierres en les déchaussant et en accentuant l’érosion ou bien en les empruntant à un muret de restanques.
https://www.leparisien.fr/societe/vacanciers-arretez-d-empiler-des-pierres-a-la-plage-ou-a-la-montagne-19-08-2019-8135796.php
Pour en savoir plus:
Géographe et enseignant, A. Gillet a soutenu à l’automne 2008 une thèse sur la géographie erratique du cairn, l’artefact en pierre sèche dont les usages traversent les cultures et les sociétés.:https://www.unige.ch/sciences-societe/geo/archives/gilletalexandre/